Friday, January 23, 2009

Guerre au Nord-Kivu, Appui du Rwanda au Cndp : Kagame dément sans convaincre

Kinshasa, 20/12/2008


Pince sans rire, Paul Kagame soutient ne jamais « connaître Nkunda ». Il a déclaré : « Je ne le connais pas. Je n’ai jamais parlé avec lui. Je ne l’ai vu qu’à la télévision comme tout le monde ». Amnésie ou démenti ? Nul ne le sait.

Le président rwandais est monté au créneau pour rejeter le rapport des Nations unies sur le soutien qu’apporte son gouvernement au CNDP, la rébellion qui sévit dans l’Est de la RDC. Devant la presse, l’homme fort de Kigali dément, sans convaincre ne jamais connaître Laurent Nkunda. Là où Paul Kagame a failli dans sa stratégie de communication pour se tirer de l’étreinte du rapport onusien, c’est lorsqu’il affirme n’avoir jamais parlé avec Laurent Nkunda.

Face à ces déclarations, pour le moins surprenantes, aucun observateur sérieux n’y a prêté le moindre crédit. Et pourtant, l’histoire récente de ces deux hommes démontre qu’ils ont d’une manière ou d’une autre évolué ensemble. D’abord, lors de la marche victorieuse du Front patriotique rwandais (FPR) qui a conduit Paul Kagame au pouvoir, Laurent Nkunda avait pris part aux combats. Il est ainsi exclu que Kagame ne l’ait jamais rencontré à cette occasion. Un frère d’armes, pour les militaires, ne s’oublie pas. La solidarité du front ne s’efface pas par un coup de baguette magique ou une amnésie circonstancielle.

Comme pour contredire le général-président, des analystes rappellent le soutien total apporté au RCD. En cette période, des réunions mixtes d’états-majors se tenaient à Kigali tout comme à Goma et dans d’autres villes sous le contrôle de ce mouvement politico-militaire de 1998 à 2003. Personne de censé suivant l’évolution politique dans la sous-région des Grands Lacs africains ne peut accepter d’avaler cette mixture de Paul Kagame. Dans le pire des cas, il se pourrait que Laurent Nkunda n’ait été qu’un petit exécutant de basses besognes. Est-ce pour autant vrai que le président rwandais ne lui ait jamais adressé la parole ?

En bon stratège militaire, Paul Kagame oublie, sans aucun doute, que Laurent Nkunda a déclaré avoir en commun avec le Rwanda la neutralisation des interhamwe. Il est exclu que celui-là même qui exécute la besogne, si chère au Rwanda, ne soit pas en contact avec le président de ce pays. Une relecture de l’interview du président rwandais au journal belge Le Soir ne révèle-t-elle pas mieux son état d’esprit vis-à-vis de Nkunda ? L’autre preuve qu’administrent les analystes repose sur l’attaque de Bukavu par Mutebusi et le même Nkunda. Vers quel pays s’étaient-ils repliés ? N’est-ce pas le Rwanda ?

Dans le même élan, les spécialistes des renseignements militaires contactés considèrent que le président rwandais ne pouvait se permettre le luxe de s’interdire de scruter en profondeur la personnalité qui partage plusieurs centaines de kilomètres de frontières avec son pays. «Dans cette zone où pullulent des hors-la-loi de tout genre, ne pas parler avec celui qui soustraite la question des interhamwe est un mensonge éhonté », a confié un attaché militaire africain en poste à Kinshasa.

Une autre évidence qui bat en brèche les déclarations de Paul Kagame touche à l’approvisionnement du CNDP. Si ce mouvement rebelle s’est battu pour prendre le contrôle des frontières communes avec le Rwanda, c’est justement pour assurer ses arrières dans l’éventualité d’un retrait. Qu’un conseiller de Kagame reconnaisse la présence des démobilisés rwandais dans les rangs du CNDP démontre si besoin en était encore que le Rwanda connaît non seulement l’existence de ce mouvement mais aussi son chef.

Il est vrai que Kagame ne pouvait pas accepter publiquement ses collusions avec Nkunda, mais il s’y est mal pris en prenant l’opinion pour naïve et incapable d’analyses. Paul Kagame a simplement menti !

Soutien à Nkunda : la Suède suspend son aide budgétaire au régime de Kigali

Le Rwanda a rejeté hier le rapport de l’ONU l’accusant de soutenir et d’armer la rébellion tutsie dans l’Eest du Congo mais, emboîtant le pas à la Hollande, la Suède a suspendu son aide budgétaire au régime de Kigali. Le Conseil de sécurité de l’ONU étudie cette semaine le rapport de 132 pages du Groupe d’experts sur le pillage de la République démocratique du Congo (RDC). Les enquêteurs blâment aussi le Congo pour son appui aux rebelles hutus rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), en lutte contre le régime à prédominance tutsie de Kigali.

Et ils accusent les FDLR de participer au pillage des ressources du Congo, au même titre que le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) du « général » Laurent Nkunda, Un Tutsi congolais. Dans une réponse de sept pages, le Rwanda décrit le rapport de l’ONU comme « inexact et partial », estimant qu’il « a été calculé pour détourner le blâme » du Congo et de l’ONU, « qui n’ont pu résoudre le conflit ».

Le Parlement hollandais pressait le ministre de la Coopération Bert Koenders depuis novembre pour qu’il gèle l’aide de 4 millions de dollars de La Haye au Rwanda.

Soutien détaillé

« J’attends les conclusions de l’ONU avant de décider », avait déclaré Koenders le 29 novembre, de retour de Kigali. Les conclusions, tombant cette semaine, sont accablantes pour le Rwanda. « La Suède prend au sérieux le rapport de l’ON U et a bloqué le versement annuel de 14;5 millions de dollars au budget du Rwanda », a annoncé hier Stockholm. L’enquête, effectuée en vertu d’un mandat du Conseil de sécurité de l’ONU, révèle dans ses moindres détails le soutien systématique et multiforme du Rwanda à la rébellion de Nkunda.

Fournitures d’armes et de militaires, enrôlement d’enfants soldats, facilités bancaires sont autant de contributions de Kigali au combat contre ses exiles hutus en territoire congolais les empêchant de ramener la guerre au Rwanda. Les FDLR regroupent d’anciens « génocidaires » du régime Habyarimana renversé en 1994 par le FPR (Front patriotique rwandais) tutsi, et des Hutus rwandais nés au Congo après leur exil massif. Ils veulent reconquérir le Rwanda pour la majorité hutue (85%), tout comme la minorité tutsie (14%), exilée après l’abolition de la monarchie, ont repris le Rwanda par les armes avec la guerre de 1990-94.

Guerre inachevée

Cette guerre, inachevée, se poursuit dans l’est du Congo. Les victimes sont congolaises - mourant au rythme de « deux tsunamis » (500.000 personnes) par an, selon l’ONU. Et les ressources pillées pour la financer sont congolaises - diamant, or, coltan, bois, cheptel, café, plus des taxes imposées aux civils.

Des voix s’élèvent aussi en Grande-Bretagne, principal soutien de Kigali, avec les Etats-Unis, pour pousser le Rwanda à lâcher Nkunda et pacifier le Congo. « Paul Kagame, le président du Rwanda, est un favori des Britanniques qui lui versent des dizaines de millions de livres en soutien budgétaire. Mais son rôle dans l’Est du Congo est inquiétant. Il est temps de lui dire que l’aide cessera s’il ne met pas Nkunda au pas », écrit le directeur de la Royal African Society.

Kenneth Roth, directeur de Human Rights Watch (HRW), écrit que Londres doit « cesser de tourner en rond » et pousser l’Europe à déployer une force de soutien aux Casques bleus de la MONUC dans l’est du Congo. L’intervention de Roth coïncide avec le refoulement, pour la deuxième fois en trois mois, d’Alison Desforges, principale conseillère de HRW sur l’Afrique, par les autorités rwandaises le 2 décembre. Mme Desforges avait soutenu le FPR en 1994, mais elle ne se gène plus pour critiquer les violations commises par Kigali.

(SL/Th/GW/Yes)

Le Potentiel/ Le Palmarès

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