Friday, January 23, 2009

Nkunda victime de l’entente surprise entre Kinshasa et Kigali

vendredi, 23 janvier 2009

Le chef rebelle congolais Laurent Nkunda, devenu « incontrôlable » selon des observateurs, a été victime d'un retournement surprise d'alliance entre Kinshasa et Kigali ayant conduit à son arrestation jeudi.



MONDE - INTERNATIONAL 16:02
« Nkunda était devenu incontrôlable. En plus, il était devenu gourmand financièrement. Il ne voulait pas dépendre de Kigali et se finançait directement (par le trafic de minerais) au détriment de ceux qui étaient censés être ses alliés (le Rwanda) », avance Gérard Prunier, chercheur français au CNRS (Centre national de la recherche scientifique) et spécialiste de la région.

Depuis des années, Kinshasa accusait Kigali de soutenir le Conseil national pour la défense du peuple (CNDP) de l'ex-général tutsi congolais Laurent Nkunda, des accusations étayées mi-décembre par un rapport de l'ONU. Kigali a toujours nié, tout en reprochant constamment à Kinshasa de refuser de désarmer les rebelles hutu rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), basées dans l'Est de la RDC depuis le génocide rwandais de 1994.

La dernière offensive du CNDP contre les forces gouvernementales lancée fin août 2008 dans le Nord-Kivu a déclenché d'intenses pressions diplomatiques internationales pour amener les deux gouvernements à en finir avec les groupes armés dans la région. Ces pressions se sont traduites par l'annonce surprise mardi par Kinshasa d'une opération militaire conjointe RDC-Rwanda contre les bases des FDLR. Mais le déroulement des opérations depuis mardi démontre que l'opération avait également un autre but, la neutralisation de Laurent Nkunda. « C'est un deal qui s'est fait de président à président. La preuve, Vital Kamerhe, le président du parlement congolais, a expliqué qu'il n'était pas au courant », assure M. Prunier.

Un diplomate en poste dans la région et spécialiste de cette crise renchérit: « Dans le cadre de l'accord entre Kinshasa et Kigali, il était prévu que le CNDP aide les FARDC à combattre les FDLR. Nkunda a refusé ». « Puis l'armée rwandaise est entrée en RDC. Nkunda s'est senti trahi et disait en privé: je suis Congolais, nationaliste, et je suis prêt à me battre contre les Rwandais. » « Ca a scellé son sort », explique ce diplomate sous couvert de l'anonymat. « Kagame s'est dit: j'ai tout à y gagner. Je ne contrôle plus Nkunda, j'élimine les FDLR et je fais un deal avec Kabila qui va contenter la communauté Internationale », ajoute M. Prunier. A Kigali, la version officielle est toute autre: « Le général Nkunda a été arrêté car il voulait s'opposer à l'opération militaire conjointe », a assuré vendredi le porte-parole de l'armée rwandaise, le major Jill Rutaremana.

Les FDLR reprennent quant à eux la thèse du chef rebelle lâché par son tuteur. « Cela ne nous a pas surpris. Il n'était qu'une marionnette entre les mains du Rwanda. L'armée rwandaise pouvait à tout moment en faire ce qu'elle voulait », a déclaré le président des FDLR, Ignace Murwanashyaka, joint au téléphone en Allemagne. Si M. Kabila peut se prévaloir de la neutralisation de Laurent Nkunda comme d'un premier succès de cette opération conjointe, l'accord conclu avec son homologue rwandais n'en demeure pas moins une prise de risque énorme pour le chef d'Etat congolais, estiment le diplomate et le chercheur. « Il joue avec une grenade dégoupillée. On sait quand l'armée rwandaise est entrée, on ne sait pas quand elle repartira », souligne le chercheur.

De même, rappelle M. Prunier, le souvenir des atrocités de l'armée rwandaise pendant les années de guerre en RDC (1998-2002) marque toujours les esprits dans la population du Kivu, un des bastions électoral de M. Kabila lors de son élection en 2006.

No comments:

Post a Comment

Rwanda

Rwanda
Administrative map

Blog Archive