Monday, April 3, 2006

L’éthnicité un sujet tabou après le génocide

Hutu ou tutsi était une question de vie ou de mort durant le génocide de 1994 au Rwanda.

Aujourd’hui, ces deux mots sont devenus tabou. Mais la tension éthnique se manifeste entre les Rwandais.


“Nous avons une bombe à retardement », dit Danny Sibomana, un étudiant rwandais en parlant de l’ethnicité aujourd’hui.

Même si le gouvernement met son effort en rayant la mention éthnique dans des cartes d’identité, le problème existe toujours. Jeunes et vieux, villageois et intellectuels ont différentes opinions sur le sujet.


Danny Sibomana, étudiant finaliste journaliste, marié, père d’un enfant, rayer la mention éthnique dans les cartes d’identité n’a aucune importance.

«Cela n’empêche que je sois ce que je ressens, les Burundais viennent de voter leur constitution adoptant le partage équitable du pouvoir partant de leur éthnies»
Il continue en ces mots
«L’essentiel est me donner mes droits mais n’est pas de rayer l’ éthnie dans ma carte d’identité. Nous Rwandais sommes très hypocrites, nous gardons l’éthnicité gravée dans nos cœurs.»

Isaïe Batega, 79 ans, hutu nous dit:
«Etre hutu ou tutsi est un problème si on l’utilise pour usurper mon droit.»

Il continue : «…nous étions ensemble unis sans aucune forme de discrimination avant l’arrivée des blancs qui nous ont séparés en nous attribuant des caracteristiques divisionistes fondées sur l’éthnie.»

Les Rwandais accusent les belges d’être à la base de l’inégalité et à la mise en place du label éthnique aux citoyens.

Aux origines, le Rwanda était un pays égalitaire «…les Rwandais étaient les enfants du même père. L’inscription du label éthnique sur la carte d’identité et le monopole du pouvoir réservé aux tutsi mirent fin aux hutu et au tutsi frères et consacrèrent l’affrontement et l’irruption de l’éthnie dans le champ du pouvoir politique…» remarque Servillien Sebasoni dans «l’Idéologie génocidaire»(24 avril 2003).

Simbi Ernest, 32 ans, victime du génocide, tutsi nous déclare qu’il ne peut jamais épouser une fille hutue.
«Même si la mention éthnique n’est plus dans nos cartes d’identité je suis sûr que je ne ferai pas une betise d’épouser une fille hutu, après tout je ne suis pas bête pour épouser le gendre d’un tueur de ma famille», dit Simbi Ernest.

Freddy Mutanguha, tutsi, coordinateur du Projet Aegis trust Murambi, qui construit et entetient les sites mémoriaux du génocide peut s’allier avec une personne de l’éthnie différente mais seulement dans le cadre des affaires mais s’il s’agit du social, il est catégoriquement extrème au mixage d’ethnie pour le simple sort de ses enfants. Son collegial l’épaule puisque la plupart des enfants mixte d’ethnies ont été abattus par leurs oncles et les gens qui ont des liens de parenté proche.

Au village de Murambi, tout près du site mémorial où plus de 100 000 tutsi ont perdu leurs vies pendant le génocide, nous avons rencontré Modeste Nshimiyimana. C’est un hutu. Ses parents se sont réfugiés en R.D. du Congo en 1994. Il s’est marié avec une tutsi rescapée du génocide. Avec leurs quatre enfants, ils sont «un couple heureux».

Libérathe Murayire, une tutsi de 51 ans, son mari, hutu tué pendant le génocide.
«Un couple heureux entre hutu et tutsi est une illusion».
Elle continue en regrettant sa vie antérieure :

«Moi aussi j’étais heureuse le jour de mon mariage, c’est pendant le génocide que j’ai réalisé que j’ai commis une grosse erreur, mes beaux-frères me harcelaient à mourir» nous raconte Libérathe Murayire au visage plissé.

Winifride Niyitegeka, une ancienne employée de la commission nationale d’unité et réconciliation de la province de Butare depuis cinq ans, nous révèle :
«Je suis hutu mariée à un hutu, même s’il serait tutsi je n’aurais pas de regret. Ne pas mentioner l’éthnie dans nos cartes ne nous empêche pas de nous reconnaître. Cohabitons, nous sommes d’abord rwandais.»

Pour Winifride Niyitegeka :
«Etre hutu ou tutsi ça ne sert à rien. Est-ce une hypothèque à la banque ? Un bon de trésor ? »

«Non… essayons de travailler pour notre patrie plutôt que discuter sur des choses sans importance ». Essaie-t-elle de répondre à ses questions.


Emmanuel Mungwarakarama

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